
Flammarion & France Culture, 2025
265 pages
lu
Une société désirable
Comment prendre soin du monde
Au moment où nos médias sont saturés par le bruit de la guerre ou par les slogans d’ingénieurs du chaos tels Donald Trump et Vladimir Poutine, Dominique Méda revient sur les causes du sentiment de dégradation des conditions de vie qui sont à l’origine du vote d’extrême droite.
Elle décrit en détail le basculement idéologique entre le consensus de Philadelphie, qui nous a fait construire un Etat-providence, et le consensus de Washington, qui promeut l’assurance privée et la concurrence chez les prestataires de services. Alors que la mondialisation n’a fait qu’exacerber le processus de destruction des conditions de vie sur la terre et accélérer le dérèglement climatique, de plus en plus de scientifiques nous invitent à regarder en face la catastrophe qui vient. Pourquoi nos sociétés se sont-elles engagées dans une voie sans issue ? Comment rendre un changement de cap non seulement désirable mais effectif ?
Cet ouvrage explore les voies de sortie de trois grandes crises — la crise du travail, la crise de l’Etat-providence et la crise écologique — et présente les politiques qui permettraient de renouer avec le plein-emploi. Le livre dessine ainsi les contours d’une société désirable. Il invite à développer des « passions joyeuses » au service d’une société qui a redéfini le progrès non plus à partir d’une croissance économique sans fin, mais « de la permanence d’une vie authentiquement humaine sur terre », selon la formule de Hans Jonas dans Le principe de responsabilité (Cerf, 1990).
Ce livre fait du bien. Il réorganise et enrichit des réflexions présentées d’abord comme chroniques de France-Culture intitulées « le pourquoi du comment : économie et social ». La professeure de sociologie à Paris-Dauphine montre comment sa pensée se construit à partir d’une lecture positive et critique de ses collègues, sociologues, économistes et historiens. Il appelle à une alliance entre les scientifiques du climat et les sciences humaines capable de surmonter les clivages disciplinaires et de mettre en route des ingénieurs, des artisans de l’agro-écologie et des politiques visionnaires. Un chant du cygne ? Peut-être, mais il est bon de l’écouter au moment où l’Europe cherche son destin.
Bertrand Hériard, aumônier du secteur de Marseille.