Cécile Lesage

Psychologue

Cécile Lesage

Psychologue

Publié le : 10/12/2025

4 minutes

témoignage

Dans le milieu médicosocial, espérer contre toute espérance

Certaines réalités professionnelles peuvent être particulièrement difficiles à vivre. Cécile Lesage, psychologue, témoigne de la façon dont elle vit l’espérance dans son travail malgré la dureté du quotidien  

Psychologue au sein de services qui interviennent quand des enfants et adolescents autistes sont sans solution d’accompagnement adapté, Cécile Lesage a pour mission de soutenir les professionnels et les familles sur le terrain et de contribuer à développer des partenariats pour construire des réponses pérennes répondant aux besoins de ces jeunes.

Cécile, comment vis-tu cette mission aujourd’hui ?  

Je souffre d’un paradoxe déstabilisant entre les avancées légales — le droit à un accompagnement de qualité pour tous — et l’absence de moyens supplémentaires pour mettre en œuvre ces avancées. Cette exigence de qualité se double d’une pression à la “rentabilité”, d’une inflation des normes et des procédures, d’objectifs mesurables à évaluer, d’indicateurs à suivre… alors que dans nos métiers devenus non attractifs nous manquons de personnel.

Au quotidien, nous ne pouvons que « faire au mieux » pour que des enfants ne restent pas sans rien ou avec si peu, pour que les parents ne craquent pas, pour que les équipes éducatives tiennent… Résultat : un sentiment de colère envers les autorités responsables et surtout d’impuissance face à des listes d’attente interminables, des familles désemparées et des équipes au bord du burn-out. L’écart entre ce qu’il serait bon de faire et ce que nous pouvons faire est dur à supporter. 

Garder l’espérance malgré les difficultés  

À grande échelle, je vois le chemin parcouru depuis les années 1960. Un de mes oncles, très handicapé, a dû être placé en Belgique faute de structures en France. Aujourd’hui, il existe des établissements pour tous les âges, une meilleure compréhension des troubles grâce aux progrès de la recherche et un regard social moins stigmatisant. Les combats des parents et des professionnels ont changé la donne. Des films comme Un petit truc en plus en témoignent. Ces avancées me font croire que les luttes actuelles porteront aussi leurs fruits. 

Au quotidien, ce sont les « petites victoires » qui me redonnent de l’énergie : Lila, une fillette angoissée, qui ose un apprentissage ; un élève de CP qui tend un cerceau à Naïl, petit garçon autiste venu partager une heure d’activité sportive ; une maman qui reprend espoir grâce à un traitement et un accompagnement pour son fils… Ces moments révèlent la persévérance des jeunes, des parents, des professionnels, et la force de la coopération. Ils prouvent que des relations humaines authentiques ouvrent des possibles. 

L’espérance naît de ces avancées collectives et de ces succès individuels, qui témoignent de la fécondité de relations vraiment « humaines » 

Une foi bousculée par le doute  

Ma foi chrétienne est sans cesse bousculée par le doute : pourquoi des handicaps d’une telle violence ? Pourquoi tant de souffrances ? Comment notre Dieu toute bonté peut-il permettre cela ? Cela reste pour moi une immense question.

Grâce à la lecture d’écrits de Maurice Zundel, je suis sortie d’une représentation du Dieu « tout puissant ». Je saisis mieux que Dieu qui est amour, ne « peut rien » sinon aimer et se communiquer à nous, si nous le voulons, pour que nous le portions au monde.  

Ouvrir les yeux à la présence agissante de Dieu 

Pas à pas, j’essaye de suivre Jésus Christ qui nous montre par sa vie le chemin vers son Père. Souvent une phrase de l’évangile ou du psaume du jour me redonne confiance. L’Evangile des cinq pains et des deux poissons est l’un de mes phares : pour le bien des hommes, notre Dieu multiplie ce que nous offrons de nous-mêmes, qui est si petit.  

L’expérience de la relecture, à laquelle j’ai été initiée grâce à Eccleria, m’est aussi d’un précieux secours : elle ouvre mes yeux aux signes de la présence agissante de Dieu.  

Mon expérience me fait dire que, oui, je crois que le Seigneur marche avec nous, Il nous a donné son Esprit pour qu’ensemble nous fassions reculer le mal et grandir l’amour. Telle est mon espérance ! 

« Je suis avec vous jusqu’à la fin des temps » — Matthieu 28, 16–20  

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