Nouvelle Cité, 2022
296 pages
lu
EnquĂȘte sur la culture du don en entreprise
Anouk Grevin connaĂźt bien le sujet du don au travail. Câest le titre de la chaire quâelle occupe Ă Nantes UniversitĂ© et la thĂ©matique de plusieurs de ses ouvrages. Dans le titre de son nouveau livre, le mot important est « culture ». Câest bien plus vaste que la seule « pratique du don ».
Lâauteure prĂ©sente en dĂ©tail quatre cas, une banque aux Philippines, une chaĂźne de boulangeries en CorĂ©e du Sud, une entreprise de nettoyage au Paraguay et un grossiste de matĂ©riaux de constructions en Argentine.
Ces quatre entreprises ont Ă©tĂ© créées parfois Ă partir de rien, par des entrepreneurs, souvent maris et femmes, qui, dĂšs le dĂ©part, ou trĂšs vite, ont eu le souci premier du partage avec ceux qui sont laissĂ©s au bord du chemin. Ce partage prend des formes trĂšs diverses, non exclusives les unes des autres, partage de produits, partage du temps, des compĂ©tences et de la formation, partage des mĂ©canismes de dĂ©cision au sein de lâentreprise, partage avec les partenaires de lâentreprise, fournisseurs et clients sous des formes multiples, qui ont presque toutes un impact financier.
Chacune de ces aventures est bien entendu particuliĂšre. Mais câest parce que, dans chaque cas, il y a une cohĂ©rence globale, comprise et largement partagĂ©e par les salariĂ©s, que lâon peut parler de « culture ». Cette culture impacte autant les relations au sein de lâentreprise que celles avec le territoire oĂč chacune est implantĂ©e. Par des voies diverses, plusieurs dĂ©veloppent cette culture du don Ă lâextĂ©rieur. Lâun des chapitres relatifs Ă lâentreprise argentine sâappelle « la technique du don en cascade ».
Ce panorama ne doit pas laisser croire que tout est parfait. Lâauteure a cherchĂ© Ă saisir les points faibles, en Ă©coutant de la façon la plus objective possible. Mais lâensemble est saisissant de crĂ©ativitĂ©, de sens de la relation confiante entre les personnes, quelles que soient leurs fonctions. Et le plus saisissant est que ce sont des entreprises qui ont connu un dĂ©veloppement considĂ©rable et qui continuent Ă bien marcher. Cette culture du don est un facteur dynamisant pour lâentreprise, mĂȘme si ce nâest pas dans une perspective utilitariste que leurs dirigeants et leurs Ă©quipes y sont tant attachĂ©s.
Sans en parler beaucoup, lâauteure fait mention du terreau qui a favorisĂ© ces initiatives, lâ« Ă©conomie de communion », créée il y a 30 ans, dans la mouvance des Focolari, et fortement ancrĂ©e dans la doctrine sociale de lâĂglise.
Arnaud Laudenbach